A l’instar de l’œuvre d’un Bong Joon-Ho, chaque nouveau film de Park Chan-Wook est attendu comme un évènement auprès de la planète cinéphile qui aura subi en 2003 l’électrochoc Oldboy. Après une pause en forme de récréation maladive, dessinée sous les traits d’une comédie loufoque lorgnant du côté de la science fiction, le mal aimé Je suis un cyborg, Park Chan-Wook revient au genre qui le fit connaitre, le film pulsionnel par excellence, dévoreur d’âmes égarées dans les salles obscures. Obscure, Thirst l’est clairement. On ne va pas revenir cent-sept ans sur le pitch du film (calqué sur la structure du Thérèse Raquin d'Emile Zola), tout le monde le connaît après l’énorme buzz qui entoura « le dernier film de Park Chan-Wook », qui n’aura pas succombé à la tentation de le numéroter comme auraient pu le faire un Tarantino, Kim Ki-Duk ou encore Liu Fendou. Néanmoins ce n’est pas pour autant que le cinéaste se fera des amis avec cette nouvelle variation du mythe du vampire, puisque Thirst ne diffère pas grandement de ce que l’on a déjà vu dans l’œuvre du « boucher coréen » comme l’a si gentiment surnommé un rédacteur de Chronicart. On retrouve un prêtre livré à lui-même, comme l’ont été Oh Dae-Su (Oldboy) ou Geum-Ja (Lady Vengeance) après leur sortie de taule, se portant volontaire pour une expérience en Afrique. Il en reviendra gorgé de virus, mais contrairement aux cinq-cents autres cobayes, bel et bien vivant. Un virus que l’on distingue par la formation de pustules purulentes sur le corps de ce dernier, dont il peut se débarrasser en buvant du sang frais. Ce qu’il ne tardera pas à faire pour cacher sa maladie à celle pour qui son cœur bat encore, la belle Tae-Joo. En venant au chevet de son frère malade, il se rappellera d’elle à l’époque où ils étaient adolescents. Au départ timide, leur relation prendra une tournure beaucoup plus forte et passionnelle à mesure que Sang-Hyun sirote pour survivre. Comme il le dit très justement à un autre prêtre, les vampires ne sont pas immortels.
Débarrassé de sa mise en place lente et plutôt sage, ponctuée de scènes sanglantes qui font du bruit –logique lorsque l’on vomit du sang par litres, Park Chan-Wook aligne les séquences au très fort pouvoir érotique, instants sulfureux uniques dans l’œuvre du cinéaste. Pour la rigolade, Thirst est considéré comme un Twilight saignant, comparaison aussi risible soit-elle puisqu’on y baise au bout d’une demi-heure. Et quelle baise mes aïeux, terme volontairement vulgaire car ce que l’on voit à l’écran n’a pas grand-chose de très sensuel : on y lèche les doigts, les pieds ou encore les aisselles –les amateurs de AV japonais seront servis !- comme une bête le ferait sur son morceau de gigot saignant. Charnelles et fusionnelles, les séquences érotiques masquent le désespoir des personnages, tous plus ou moins misérables. Sang-Hyun est réduit à se nourrir de sang s’il veut rester présentable et vivant, Tae-Joo vit dans une famille de demeurés qui la traite en esclave, elle rêve de s’évader et de vivre un jour nouveau bien qu’elle ne soit pas tout à fait claire non plus. Une fois bien entamé, au moment où la relation entre les deux êtres est à son paroxysme –un pêché en lui-même puisque la tentation est bannie du cahier des charges des hommes de l’église, la folie va s’emparer de l’être que l’on pensait faible, et à Park Chan-Wook de piéger son audience en inversant le rôle des bourreaux, à défaut que Sang-Hyun se nourrissait jusque là sans tuer.
Une de ses techniques était par exemple de siroter par intraveineuse le sang d’un chouette type dans le coma, manière plutôt polie pour se rassasier. La belle et outrageuse jeune femme ira à la pince coupante, c’est tellement plus simple. L’art malpoli de Park Chan-Wook est d’ailleurs de ricaner du sort de ses personnages, de mettre en image leur désespoir sous forme d’humour, comme lorsque Sang-Hyun explique à Tae-Joo qu’être vampire c’est simplement avoir un régime alimentaire différent, ou lorsqu’il lui montre la manière dont il se nourrit en s’allongeant par terre, intraveineuse au bec. Cet humour deviendra encore plus pinçant dans son épouvantable avant dernier acte, où Tae-Joo s’amusera à massacrer sa famille, la rendant détestable et méprisante. On peut en l’occurrence reprocher à Park Chan-Wook de déshumaniser de manière complaisante ses personnages, de rire de leur sort en les écrabouillant sans gêne. Femme brisée, mère de famille devenue paralysée et qui assiste aux joyeuses fiestas sanglantes dans son propre salon, incapable de bouger le petit doigt, ou encore un mari noyé revenant narguer ses bourreaux dans des hallucinations au fort pouvoir graphique. L’habillage du film est d’ailleurs terrible. « Terrible » lorsque ce terme est vulgarisé, c'est-à-dire une mise en scène qui jouit comme à l’accoutumé d’une précision évidente, elle n’évoque rien mais frappe la rétine, obsession d’un cinéaste qui aura forgé ses talents de metteur en scène par une solide cinéphilie. « Terrible » également dans sa gravité, cette même mise en scène devient gênante, presque déplacée dans cette orchestration parfois gerbante de la misère humaine, ou le ricanement devient un tic, presque une erreur. Rien ne prête réellement à rire, mais le traitement formel opéré par Park Chan-Wook, admiratif de ce qu’il met en scène puisqu’il fait tout pour la rendre la plus maniérée possible, ne se marie pas toujours très bien avec certains aspects narratifs. Le cinéaste fait certes systématiquement mouche lorsqu’il capte la moindre poésie émanant de l’amour des deux personnages principaux, notamment lorsque Sang-Hyun offre ses souliers aux pieds abimés de sa future belle ou lorsqu’il lui montre en pleine nuit ses pouvoirs sur les toits de la ville. Et dans le dernier acte final, particulièrement réussi car à la tonalité différente de la moiteur crade des décors tout du long, au moment où Tae-Joo se rend compte combien il est en fait bon de vivre, la désagréable sensation d’avoir eu affaire à un cinéaste incapable de faire autre chose que du rentre-dedans sévère et méchant sur toute la ligne casse toutes les fondations construites en cours de route. On se dit alors que la poésie entrevue le temps d’une poignée de scènes absolument merveilleuses n’était que gadget, éphémère, notamment avec ce dernier plan sur les souliers –un symbole, censé être drôle, mais qui rappelle surtout que Park Chan-Wook veut rire jusqu’au bout, et a surtout bien ri, de ses personnages réduits à l’esclavage permanent.
Formidable dans sa démarche de s’approprier les codes du film de vampire pour les moderniser, Thirst mérite d’être vu pour ses solutions formelles, ses instants torrides, ses quelques élans poétiques surprenants de la part de l’auteur d’Oldboy et l'interprétation remarquable du tandem Song Kang-Ho / Kim Ok-Bin. Ce qui n'est pas rien. Mais lorsque Park Chan-Wook se complait dans le crade, le massacre et le ricanement discret mais permanent sur le sort réservé à chaque personnage, difficile d’adhérer à une telle manière de voir les choses. Le cinéaste confiait en interview que l’humour rend les séquences plus épouvantables encore. De là à le tolérer…
Tout a déjà été dit dans les autres critiques ici présentes, alors je ne vais pas m'apesantir à décrire le film.
J'ai peut-être été influencé par tous les mauvais avis que j'ai entendus à droite et à gauche, mais j'ai au contraire plutôt bien aimé ce film. Ce n'est de loin pas le meilleur de Park Chan-Wook, mais il contient son lot de scènes cultes. Que ce soient les scènes de sexe proche du sado-maso, l'aménagement de leur petit intérieur de vampires ou simplement la scène finale qui noie complètement le côté dramatique grâce à une approche comique, ce sont autant de séquences parfaitement maîtrisées, avec des mouvements de caméras parfois audacieux, et un certain charme dans les couleurs, entre le glauque et le baroque.
Mais c'est par contre dans la liaison de ces moments que le film s'emmèle. On se perd, on reste dans une attente frustrée, on s'ennuie. Cela constitue essentiellement la partie centrale, bien trop longue, qui semble être une tentative de Park Chan-Wook de nous livrer une grande oeuvre dramatique, destinée à émouvoir les festivaliers de Cannes. Heureusement que j'ai continué mon visionnage, puisque toute la fin devient ensuite délirante, le réalisateur se lâche, va jusqu'au bout de ses idées, changeant complètement la donne et l'intrigue du film. Une ambiance étrange, dérangeante, unique, s'installe alors, et le spectateur n'a alors pas la moindre idée de la finalité.
Ni le chef-d'oeuvre annoncé par les uns, ni la bouse dénoncée par d'autres, il s'agit surtout d'une production inégales de la part du plus célèbre réalisateur coréen, qui semble se chercher, entre les attentes des fans et ses ambitions personnelles.
En partie inspiré d'un roman d'Emile Zola, Thérèse Raquin, Park Chan-wook propose une recette multi-genres avec de la comédie, de l'érotisme, du drame amoureux, et des vampires sous stéroïdes façon Anne Rice. En dépit de ce maelstrom de sensations alléchantes, Thirst n'est pas à la hauteur des précédentes livraisons du réalisateur.
Certes Park Chan-wook sait filmer mais trop de défauts structurels ou de choix contestables entâchent la bonne vision d'une oeuvre aussi bigarrée. Prenons par exemple les excès de maniérisme que l'on trouvait déjà dans "Sympathie for Lady Vengeance où certains plans lèchés étaient juste élaborés pour le plaisir d'être placés en dehors de toute considération rythmique. Ici ce sont des effets spéciaux tape à l'oeil qui viennent se poser comme une mouche dans l'assiette du cinéphile exigeant. L'intrigue quant à elle est laborieuse, longue à s'enclencher, et le basculement entre les genres s'opère sans réelle harmonie. Thirst n'arrive pas à trouver son identité et seule l'ambiance huit-clos de la dernière demi-heure sauve le film.
En-dehors de son puissant "JSA" (qui se déprécie dangereusement dans le temps après re-visionnage effectué au dernier festival de Vesoul), je ne porte vraiment pas Park Chan-wok dans mon cœur. Un réalisateur, qui a bâti son entière réputation sulfureuse sur des scènes de violence absolument gratuites et la revendication d'influences américaines, Tarantino en tête, qui – lui-même – est déjà une sacrée machine à recycler de ce qui s'est fait (mieux) avant. Bref, Park Chan-wok est le trader des réalisateurs, un mec opportuniste, qui a réussi à se tailler une réputation mondiale à coups de poudre aux yeux et pillage d'autres réalisateurs bien plus talentueux – ce qui est déjà un exploit en soi et finalement pas si anormal dans la société actuelle.
Pourtant, "Thirst" a réussi à me captiver un peu plus qu'à l'accoutumé – peut-être justement parce que je ne m'attendais à plus rien du réalisateur.
Démarrant comme un "Ebola Syndrome", toute la première partie en Afrique est absolument géniale…dans la pure provocation, qui est cette fois réussie…et plus dénonciatrice des dérives religieuses de nos jours, que purement gratuite.
Changement de cap et de décor total en resituant l'action à Séoul et un cheminement plus balisé, entre film de vampires furieusement à la mode actuellement et le film de super-héros initiatique avec notre héros principal tentant de se dépêtrer avec ses nouveaux pouvoirs – chose que l'on avait déjà pu voir dans le récent "Vampire Cop Ricky".
Et puis s'installe petit à petit un huis-clos de plus en plus malsain avec ce décalque du classique de Zola, "Thérèse Raquin"; mais alors, que Park Chan-wok aurait pu jouer sur l'attente, la tension et le morbide en s'inspirant des maîtres du suspense comme Hitchcock ou Polanski, il ne peut s'empêcher une nouvelle fois de déraper dans le graveleux et le grand-guignolesque…C'est que ce réalisateur n'est absolument pas fin observateur du genre humain, trop occupé à gérer sa propre personne et carrière. Bordel, il y avait de quoi transformer le sujet en véritable or massif avec de la finesse et sensibilité, mais voilà que monsieur préfère chausser les gros sabots pour mener son film au dénouement attendu.
Pourtant, il retrouve un peu de magie en toute fin du film avec cette magnifique séquence finale, réalisée de main de maître et qui reflète tout le tragique de ses deux personnages. Ne reste plus qu'à espérer, qu'il se la repassera en boucle pour analyser sa propre réussite pour mieux réussir ses futurs films !!!
Les avis précédents ont bien résumé le film, mélange improbable d'infectiologie, de crise spirituelle, de vampirisme et de drame bourgeois inspiré de Zola, parsemé de scènes de gore et de sexe dans le style Park.
Alors, on pourra isoler ici et là quelques bonnes scènes de ce fatras confus et hétéroclite mais l'ensemble est remarquablement indigeste (et interminable).
Je déteste les films de vampires, lougarous ou autres surhumains transformés pour une raison X ou Y. Partant de là, difficile de partir avec un avis objectif en allant voir ce "Thirst". PARK Chan-wook est pourtant un réalisateur que j'apprécie et dont 2 de ces films font partie de mon TOP 5, ce qui ne représente pas rien pour quelqu'un d'aussi difficile comme moi !
J'ai trouvé la prémière partie du film assez laborieuse et longue à se mettre en place, tout ça pour expliquer le pourquoi du comment de : "devine comment je suis devenu vampire". Je ne comprends pas pourquoi les scénaristes se cassent le cul à expliquer ce genre de trucs, ils prennent toujours 30 bonnes minutes à trouver une explication, qui de toute façon fini par être foireuse, parce que bon, expliquer qu'un virus mortel (sauf pour les blacks bien sûr) rend vampire ou qu'un essai nucléaire à Mururoa a fait naître Godzilla, c'est tout aussi naze. Pauvres scénaristes à vampires, j'aimerais pas être à votre place.
Passé l'heure du film, on tombe inévitablement dans un mix entre Highlander et Batman contre Catwoman, j'ai parfois du mal à savoir si je suis en train de voir un film qui est bien réalisé par PARK Chan-wook. La violence et les marres de sang sont là pour nous le rappeler, c'est bien lui qui est aux commandes. Je dénonce très rarement la violence dans les films, je suis d'ailleurs ni choqué ni quoi que ce soit dans ce film, je me demande juste si c'est bien inutile tout ça ? Alors que certaines scènes pourraient faire palir Dexter, je me demande juste à quoi ça rime.
Bref, je me suis quand même tappé la version longue de 2h30, et je ne vous cache pas ma satisfaction quand j'ai vu le générique.