Cocottes de combat
Le talent visuel d'Ann Hu est incontestable et il est étonnant de voir avec quelle économie de moyens elle arrive à ressusciter la fin des années 1940 en Chine avec la complicité du chef opérateur Scott Kevan's ("Cabin Fever").. Elève appliquée d'un certain style de Wong Kar-Wai, mais – surtout – de YonFan, elle compose chaque image comme un véritable tableau vivant. La brise agitant légèrement les fins rideaux semble même traverser l'écran pour venir caresser la joue du spectateur.
Malheureusement, ses images semblent figées sur du papier glacé d'un roman-photo particulièrement soapy, écrit par deux occidentaux, Beth Schacter et Michael Eldridge avant d'avoir été traduit en mandarin. L'intrigue ne passionne guère en racontant l'arrivée de cette demi-sœur élevée dans un milieu social beaucoup plus modeste et qui doit lutter entre émerveillement et dégoût d'un monde aristocrate auquel elle peine à s'habituer. Ann Hu recourt à la "facilité" d'une voix off, alors qu'il aurait été beaucoup plus intéressant de tenter de développer la tempête de sentiments habitant tous les personnages par des simples faits et gestes…Autre frein, celui des acteurs, loin du jeu parfait de Xun Zhou ("Balzac et la petite tailleuse chinoise") et de Vivain Wu ("Pillow Book") et qui n'ont pas vraiment le physique de l'emploi (je pense notamment à cette tranche de cake de Zhiwen "Battle of Wits" Wang que se disputent les deux sœurs).
Il serait tout de même intéressant de découvrir les deux autres longs de cette réalisatrice, ne serait-ce que pour juger de son exceptionnel talent de compositrice d'images et sa capacité à pouvoir tourner des sujets finalement assez audacieux au cœur de la Chine…