Alain | 4 | |
Ghost Dog | 3.5 | Sympathique, drôle et pas ennuyeux pour un sou, mais difficile à avaler sur la ... |
Ordell Robbie | 2 | Quelques bonnes idées mais un film souvent plombé par son manque de rigueur |
Le boulot de facteur, c'est pas passionnant, mais c'est un boulot. Sauf que Sawaki conjugue un quotidien écrasant de banalité et une solitude de plus en plus insoutenable. Quand il rencontre un ami yakusa qui vient de se couper le doigt et qui lui refile de la coke dans sa sacoche à son insu, sa vie bascule, d'autant qu'il est surveillé par des flics pas très malins qui se font des films sur sa vie en s'imaginant que c'est un dealer, voire un terroriste: un complot national va se jouer derrière son dos, et il va devenir l'ennemi public numéro 1 en étant innocent à 100% !
Parallèlement à ça, il va rencontrer dans des circonstances bizarres une jeune fille assez craquante mais qui est malheureusement atteinte d'un cancer et qui n'en a plus pour très longtemps, ainsi qu'un tueur à gages également malade incurable, qui espère remporter le titre de « roi des tueurs ». Il faut voir cette scène culte du concours de tir: il y a bien sûr le malade, mais aussi un sosie de Léon (oui, le héros de Luc Besson) et un sosie de Brigitte Lin (la tueuse à la perruque blonde du Chungking Express de WONG Kar-Wai)!!! C'est très étonnant à voir...
Avec toutes ces histoires, on a pas le temps de s'ennuyer une seule seconde! Pour son deuxième film, Sabu a réussi à dessiner des personnages attachants et une histoire originale, s'offrant même le luxe de décrire la société japonaise dans quelques uns de ses côtés peu enviables: yakusa maso, jeunesse un peu paumée (cf Tokyo Skin).Coté casting, on retrouve l'acteur fétiche de Sabu, Shinichi Tsutsumi, ainsi qu'un visage bien connu du fan de ciné japonais, celui de Susumu Terajima, l'un des acteurs récurrents dans l'oeuvre de Kitano.
Mais si le film frôle le régal pendant environ 1H20, il part un petit peu n'importe comment dans la dernière demi-heure, pour ne pas dire qu'il se barre carrément en cou@!#*: les scènes sont de plus en plus loufoques et absurdes, au point qu'on se demande pourquoi Sabu a voulu les tourner, et surtout où il veut en venir ( voir la scène où un cycliste champion olympique se lance à 100km/h sur notre facteur...). Quand à la fin, si elle est douteuse, elle est aussi déjà vue ailleurs (récemment dans Gladiator...). Certains adoreront, d'autres beaucoup moins. Pour moi, moyen...
Avec Postman Blues, Sabu tente de courir deux lièvres à la fois sans avoir totalement les moyens de ses ambitions. D’un côté, ses vélléités parodiques du film de yakuza, son second degré, son goût pour la citation l’apparenteraient à un cousin nippon des néopolars qui ont proliféré dans les années 90 suite au succès mondial de Tarantino et des Coen Brothers. De l’autre, le film a aussi des ambitions de commentaire social sur le Japon contemporain. Et si Sabu réussit relativement bien le second il réussit un peu moins bien le premier point. La première partie du film est ainsi à peu près regardable grâce à l'idée de roman d'initiation d'un facteur découvrant une vie plus excitante que la montonie de son travail, celle de gangster. Et le film comporte quelques observations bien senties sur la société japonaise en récession économique. Un yakuza se plaint ainsi d'être aussi touché par le chômage. De plus, des policiers y sont prêts à tout pour une promotion en particulier à fabriquer de toutes pièces des monstres criminels. On entrevoit aussi des signes de la banalisation du métier de yakuza dans le Japon en crise : ces derniers ont même des agences d'intérim et le moindre facteur sait où ils habitent. Rayon citation et/ou parodie, la seule bonne idée est la scène du concours de tir avec ses sosies de Léon, de Brigitte Lin et d'un professionnel melvillien. Sabu n’arrive par contre à rien faire d’intéréssant des deux précautions valant mieux qu'une wooiennes et de son tueur cinéphile. En l’état, le film pourrait être une comédie/yakuza eiga de facture correcte. C’est sans compter une seconde partie partant dans tous les sens et une fin de film en roue libre. Ce qui laisse toujours une moins bonne impression que l’inverse. La course poursuite à vélo met ainsi en valeur la capacité d'un Running out of time 2 à la filmer en toute simplicité et sans prétention. Et à force de multiplier les batteries lourdingues, les caméras portées, les cadrages penchés ainsi que les sous-histoires pour l'épate cette partie finit par ressembler à rien sauf à un Tour de France gonflé à l'EPO cinématographique. Les plans distants ressemblent en outre ici à des clichés visuels du cinéma japonais vidés de leur sens. Le film n’évite pas en outre le mielleux avec la cancéreuse qui fait pièce rapportée dans le film (et son final parachuté tout aussi mielleux). Avec un peu plus de rigueur dans sa construction narrative, un peu plus de tri fait par le cinéaste dans ses idées, le film aurait pu convaincre vraiment. Au lieu de ça, il gâche son bon potentiel.