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3.23/5
Scandale
les avis de Cinemasie
3 critiques: 3.25/5
vos avis
13 critiques: 3.29/5
Qui dit mineur ne dit pas forcément désagréable !
Scandale est en effet un film mineur dans la somptueuse carrière de Kurosawa. Même s’il traite de grands thèmes comme la justice, la vérité, l’honneur et l’obstination, il ne possède pas les atouts d’un chef-d’œuvre et reste trop anecdotique. Le sujet est pourtant étonnement moderne puisque l’histoire oppose des paparazzi et des journaux à sensation face aux stars et leur vie privée, 50 ans avant l’affaire Lady Diana… Le duel au sommet entre Mifune et Shimura vaut également le détour : Mifune, la voix grave, joue un peintre bafoué dans son amour propre par des journalistes sans scrupules ; quant à Shimura, il interprète son avocat, un vieil ivrogne pas gâté par la vie qui voit dans le procès intenté par le peintre contre le journal une formidable occasion de se racheter.
Une fois n’est pas coutume, l’intrigue déçoit un peu par ses rebondissements un peu téléphonés. D’autre part, certaines scènes traînent vraiment en longueur et auraient mérité quelques coupes au montage (dans le bar ou chez le peintre par exemple). Mais le plus décevant, c’est sans doute le manque de dialogues percutants auxquels on aurait pu s’attendre dans un film à procès : je voyais bien en effet Shimura se réveiller à la fin et offrir un plaidoyer de toute beauté comme du temps de sa jeunesse, à l’instar d’un Michel Simon dans un film des années 50 dont le nom m’échappe. Au lieu de cela, l’avocat des plaignants se confond en courbette en présentant la preuve indiscutable de la culpabilité de l’accusé. Et n’oublions pas que la chanteuse salie par l’article mensonger est d’une rare transparence alors qu’elle est au centre du film…
Scandale fera donc passer un bon moment, mais sans plus. Il précède cependant un film autrement plus ambitieux sur le thème de la vérité, Rashomon, réalisé l’année suivante.
Pétard (cinématographiquement) mouillé
Scandale est un Kurosawa mineur tourné entre les deux réussites majeures que sont le grand polar Chien Enragé et le chef d’œuvre Rashomon. Ancien peintre sans succès, le cinéaste choisit cette fois un peintre dans la ligne de mire médiatique pour personnage principal. Dommage alors que ce dernier incarne une vision assez cliché de la création artistique. Il n’est pas non plus anodin que ce film de proçès ait été tourné juste avant un Rashomon qui traitera la question de la vérité avec plus d’ambition thématique.
Dans un contexte où la presse à scandale se développait au Japon, le film se veut une dénonciation des préjudices moraux qu’elle porte à la vie d’autrui. Mais en se voulant virulent à son égard Kurosawa dépeint les journalistes de façon caricaturale, tombant ainsi dans le piège du manichéisme. Certains rebondissements du film virent de plus à l’artifice scénaristique. Kurosawa n’arrive de plus pas à trouver suffisamment de solutions formelles capables d’apporter de la tension dramatique à une partie proçès manquant de rythme. Le film est également plombé par le jeu cabotin de Shimura Takashi. Tandis que les parties concernant la fille malade étalent un trop plein de bons sentiments et sont insupportables de mièvrerie.
Tout n’est pourtant pas raté dans le film. Mifune évite ainsi les travers cabotins qu’il a pu avoir dans d’autres Kurosawa. Et le film n’est pas dépourvu d’idées de mise en scène intéréssantes. L’ouverture passant d’un gros plan de roue à un plan d’ensemble de Mifune à moto pour poser le personnage d’un peintre en pleine fuite en avant dans sa vie. Un gros plan sur une clochette suivi d’un plan large de Mifune à moto à l’approche de Noel inaugure une seconde partie de film où il va finir par relever la tete. Des superpositions d’images montrent elle la propagation de la rumeur de la presse à scandale dans la population japonaise. Les gros plans d’articles de journaux parfois séparés par des fondus enchainés scandent parfois la progression du récit. Enfin, les gros plans sur les caméras et les crépitements de flashs pendant le proçès, l’image plein écran diminuant de taille pour révéler que la scène du proçès est un extrait d’actualité ont le mérite d’exprimer visuellement l’idée de justice spectacle.
L’année suivante, Kurosawa fera un spectaculaire retour en forme en offrant avec Rashomon son premier chef d’œuvre et le film de l’explosion mondiale.
Exemplaire et bien ficelé
Dans les conditions où est sortit le film (sous la répression des Etats-Unis), on pensait y trouver en Scandale un bête film de commande et de propagande sur fond d'enquête policière histoire d'y glisser deux trois éléments scénaristiques. Et bien non, Scandale n'est heureusement pas ça, et prouve que même en temps de surveillance rapprochée sur les médias et les arts, chaque artiste a son mot à dire. Kurosawa critique dans Scandale l'univers des médias et de la presse à ...scandale. Un jeune peintre à succès (Mifune Toshirô) se voit être pris en photo à son insu avec une chanteuse à succès. Les paparazzi vont transformer ce qui n'était qu'une discussion basique autour d'une table en une affaire de coeur scandaleuse. Comme un goût de déjà vu dans notre fameuse presse nationale et internationale que sont les catastrophiques potins comme Voici, bons à satisfaire la ménagère de moins de 50 ans.
Scandale, en plus d'être une brillante satire des médias demeure aussi une drôle de vision sur la déchéance d'un homme, interprété par un brillant Shimura Takashi dans la peau d'un avocat complètement dépassé par les évènements. On y voit alors les caractéristiques du pommé de service avec la passion pour les jeux et l'alcool (hallucinante scène dans une beuverie pour fêter Noël). Le film se déroule en trois actes, avec en premier la parution de la photo scandale dans le magazine "Amour", en second lieu les recueilles de preuves et la recherche d'un avocat, et pour finir, le procès en lui même. Car il fallait s'y attendre, les victimes ne vont pas se laisser et vont traîner tout ceci en justice (quoi de plus normal). Les difficultés vont s'accumuler, la tristesse puis la mort de la fille de l'avocat ne va rien arranger, seul le courage pourra sortir vainqueur.
Mis en scène avec brio, Kurosawa n'omet aucun détail quant à la position de ses acteurs, tous cadrés avec rigueur (aucun ne parle en contre-champ) et ce, filmés dans des points différents pour rassurer et donner au spectateur le sentiment qu'il est partout et qu'il ne loupe aucune miette des décors et de l'univers qui lui est présenté. Un univers vache, dont les potins à la con ne font que le rendre encore plus pourris qu'il ne l'est.
A découvrir absolument
Après tout ce que j'avais lu sur ce film, je m'attendais à une oeuvre mineure dans la carrière du grand Kurosawa. Il n'en est rien. Bien au contraire. Mais ce film (ainsi que L'Ange ivre ou Le Duel silencieux réalisés quelques années avant) fût eclipsé par le rayonnement international de Rashômon.
Bien sûr Scandale n'est tout de même pas au niveau de qualité de ce dernier, mais il est en tous points remarquable.
Le sujet, la presse à scandale, les débordements des médias, pouvait laisser craindre un lourd film à message, avec écho actuel, qui rendrait le film visionnaire, universel, etc etc... Mais Scandale ne saurait être réduit à ça. Puisqu'il est avant tout le portrait de la déchéance d'un homme et pas celui qu'on croit. En effet, le peintre victime des paparazzi (admirablement interprété par Mifune, à la fois énergique et tendre) va peu à peu laisser la place au personnage de l'avocat joué par Takashi Shimura. Personnage faible, corruptible, dont la fille tuberculeuse ne fait que le renvoyer à sa propre déliquescence morale. Fabuleusement incarné par Takashi Shimura, comme une répétition du héros de Vivre, l'avocat devient en milieu de film le personnage principal. Le point de vue change, le film est alors bizarrement déséquilibré, mais l'intérêt n'en est que plus grand. La presse à scandale et même les scènes de procès deviennent alors un simple contexte révélateur de l'âme humaine, dans sa bonté et sa médiocrité.
La justesse de ton des dialogues et de la mise en scène portent la touche d'un Kurosawa au mieux de sa forme humaniste. Les scènes avec la jeune fille sont incroyables, pleines d'émotion contenue, comme ce soir de Noël où le peintre et la chanteuse sont réunis pour elle. Le travelling latéral, du point de vue de l'avocat, révélant petit à petit la scène, par "vignettes", témoigne de l'inventivité formelle du film. Kurosawa excelle dans la composition des plans, évitant constamment la facilité du champs-contrechamps.
Il se permet même une belle réflexion sur l'image : la photo des paparazzi ment, alors que le tableau du peintre (décrit, commenté, expliqué, convoité mais jamais montré !) révèle les sentiments.
Un film donc très riche, qui aurait peut-être gagné à développer un peu plus le personnage sous-exploité de la chanteuse, pourquoi pas en introduisant une véritable histoire d'amour avec le peintre (sous-entendue certes à travers le tableau).
Quoiqu'il en soit, si Scandale a la virulence d'un film à message (la représentation des médias est très réusssie, même si quelque peu caricaturale), il témoigne avant tout une fois encore du profond caractère humaniste de Kurosawa.
Mélo plus
Contre : ce n'est jamais qu'un mélo pas très bien joué, voir la critique de Ghost Dog ; notamment par Takashi Shimura qui en fait un peu trop, une fois n'est pas coutume (Mifune, lui, serait plutôt sobre : Kurosawa s'est arrangé pour le caler sur sa moto chaque fois qu'il a envie de se défouler).
Pour : ce n'est jamais qu'un mélo pas très bien joué, on peut se cintrer en le regardant, notamment les scènes au tribunal tout droit sorties de chez les Ricains ; les scènes de paysages urbains, magnifiques.
Presse(r) people
Inspiré à KUROSAWA pour avoir lu la "Une" d'un journal racontant comment une jeune actrice avait - soi-disant - perdu sa virginité, le sujet reste encore d'une incroyable actualité de nos jours...
Décidé d'en faire le pamphlet populaire ultime pour tenter de donner un grand coup dans la fourmilière et d'alarmer la bonne conscience de ses congénères, KUROSAWA se perd pourtant en chemin de l'écriture de son scénario...
En effet, il accorde de plus en plus d'importance au personnage pourtant secondaire du diable, réitérant l'une de ses thématiques préférées, faisant d'un homme anodin un être se dépassant pour son propre accomplissement...
Sauf qu'il ne s'agit pas vraiment du thème premier...ou alors pas introduit de la manière qu'il ne le fasse. Les personnages principaux et l'accusation première sont tous sacrifiés au profit du seul personnage de l'avocat pas aussi méritant que cela et bon nombre d'éléments par trop sensationnalistes versent ainsi dans une grandiloquence et mélodrame, qu'aurait pu éviter le réalisateur...
Il n'empêche, que l'oeuvre mineure vaut toujours mieux que nombre de productions du même style, mais qu'au sein de sa filmographie, "Scandale" n'est pas une vraie réussite.
Très mineur
Drôle d'idée de la part de MK2 que d'avoir joint à l'édition DVD de L'idiot, chef d'oeuvre incontestable (enfin, si, contesté, mais je ne comprends pas trop pourquoi), ce Scandale qui apparaît bien plat et sans saveur au regard de la production moyenne de KUROSAWA. Le pitch est assez simple : un peintre amateur de moto (MIFUNE Toshiro) est, à la suite d'un quiproquo, soupçonné d'avoir une liaison avec une chanteuse à la mode. Il décide d'attaquer le journal qui a publié les photos compromettantes en recourant aux services d'un avocat raté (SHIMURA Takashi), compromis de surcroît avec la partie adverse, mais qui trouve grâce à ses yeux en raison de la sollicitude qu'il manifeste envers sa fille tuberculeuse. Ce n'est pas que le film soit mauvais, mais il se traîne, sans que les rebondissements scénaristiques ou les dilemmes moraux auxquels Kurosawa nous a accoutumés ne viennent pimenter l'intrigue. De surcroît, à mi-parcours, celle-ci bascule entièrement du côté de l'avocat et la scène finale de procès, qui aurait pu donner lieu à un grand moment, est plate comme l'encéphalogramme d'un macchabée. A sauver, une bonne prestation de Mifune, une scène d'ivresse collective très réussie et la très, très jolie jeune première qui joure la chanteuse.